Fini les îles paradisiaques, fini le silence, le calme, la volupté, le farniente. Les petits rats des champs Soulcié qui se sentaient si bien sur plages et îles désertes se décident enfin à entrer dans les terres et le tumulte du monde. Déjà qu’en France on déteste les villes, l’idée de voyager dans des villes du monde nous mettait un peu la pression. Il faut dire que pour nous le bruit, l’agitation, le monde, le trafic, les lumières, la musique à fond c’est un peu notre vision de la souffrance inutile 😉
Mais là c’est Siem Reap, c’est pas une mégalopole (175 000 habitants ça reste correct). Ce qui est super c’est d’y retrouver le brother Bertrand qui lui connait déjà cette ville et du coup on se guide mutuellement avec les tuyaux que l’on a. Marché, marché de nuit, location de vélo, de tuk-tuk (mini voiture à 6 il ne faut pas laisser dépasser une main ou un orteil), resto chez Madame Moch ( impossible d’oublier le nom de ce tuyau, merci Namur!), Chez Geneviève (restaurant associatif qui forme des serveuses et cuisinières qualifiées, nourriture raffinée et plus chère afin de financer la formation, cercle vertueux et autonome , délicieux!).
Avis aux amateurs de polars! Voici un roman que je n’ai pas pu décrocher et que j’ai lu en 2 jours (ça faisait longtemps que ça ne m’était pas arrivé!).
Polar autour du thème des migrants et de la jungle de Calais: poignant, émouvant, déchirant.
Encore un professionnel , l’auteur est lieutenant de police, confronté à ses valeurs et le décalage avec la réalité du terrain qui témoigne d’incohérences humaines.
Auteur que je vais suivre…et que je vous conseille.
Lundi 18 mars, nous avons quitté le très sympathique « Harmony Home » de Sihanoukville en taxi. Arrêt pour prendre une carte SIM du pays. Ici entre les connexions WIFI qui coupent régulièrement, le réseau qui est très irrégulier, l’électricité qui recharge tranquilou notre ordinateur, notre tablette, nos téléphones (dont le mien est entrain de rendre l’âme), nos enfants qui vident les batteries pour jouer ou regarder une vidéo même courte! Garder la connexion avec nos proches reste compliqué et un exploit.
Dans le taxi Matis a pu comprendre le chauffeur qui lui a parlé de la chance qu’il a d’aller à l’école! (il avait bien choisi son sujet notre chauffeur!). Il lui a expliqué qu’il avait 2 enfants qui s’entendaient bien, qu’il ne fallait pas se battre quand on était frère et soeur et qu’il fallait bien travailler à l’école. Ensuite il nous a expliqué qu’au Cambodge, les familles ne font pas beaucoup d’enfants 2 ou 3 et ils doivent choisir lequel d’entre eux pourra faire ses études car il ne peuvent pas payer pour tous. Un travailleur sur chantier cambodgien touche 7$/ jour et l’école coûte 60$ par mois, cela représente un sacrifice pour une famille de donner l’accès à l’éducation à ses enfants.
Nous avons traversé Sihanoukville, cette ville dévastée que l’on croirait tout juste bombardée!! Tout est gravât! Tout est démoli, cassé, les bas côtés sont des décharges! Incroyable et triste cette ville que les touristes fuient pour le coup.
Nous sommes arrivés sous une forte chaleur au « Pier », port, pour prendre notre bateau. C’est un bateau de pêche avec une famille cambodgienne qui nous mène à l’écolodge. A chaque fois je me dis « ça va aller je ne dois plus avoir le mal de mer! » et à chaque fois un BON rappel à l’ordre me souffle (que contrairement à des membres de ma famille) je n’ai absolument PAS le pied marin. Rapidement la mer s’est mise à joliment onduler, provoquant dans le bateau de bons remous, on a commencé par Oscar malade puis nos 3 mignonnes » namuriennes » ( 😉 Chachou on a pensé et parlé de toi!) ont accusé le coup, la belle volontaire Géromine et moi tentions de faire face au mal de mer quand tout à coup un gros morceau de plastique s’est pris dans le moteur empêchant notre bateau d’avancer. Heureusement les valeurs maritimes qui ne laissent pas un bateau en détresse nous ont envoyé un autre bateau pour effectuer la traversée qui a mis une 20aine de minutes à arriver. 20 minutes qui ont fini de m’achever car nous étions dans de gros remous. Bref un trajet qui devait durer 3 heures qui en a duré bien 4 et où l’on a été remorqué par un premier bateau puis un second.
Le cadeau a été de sauter du bateau pour arriver à la nage à Lonely Beach dans une mer turquoise sublime!
Accueil très sympathique des propriétaires et des « volontaires » (8 à 20 jeunes viennent donner 5h de leur temps/jour contre le logement et la nourriture pour 15 jour à 2 mois) autour d’un ice tea maison.
Explication des règleset du fonctionnement de l’écolodge: ici l’électricité est fournie par de petits panneaux solaires installés sur les bungalows (pas de clim bien sûr, pas de ventilo, il faut apprendre à suivre l’ombre et le vent dans l’écolodge, un coup c’est dans le restaurant qu’il fait bon, puis dans les hamacs au bord de la plage..), pas d’eau courante mais un système de récupération d’eau de pluie et du puits. La douche se fait donc à la « boquette », un bol d’eau fraîche dans la réserve de la salle de bain et on se lave à même le sol (pas besoin de cabine (avec Romain on adore), idem pour tirer la chasse d’eau et pour l’évier on a une noix de coco percée qui sert de verseur d’eau. Les enfants ADORENT!!! On a bien pris goût à la douche froide (rappel agréable du Togo où il fallait tirer l’eau du puits puis se laver avec un petit seau, cela donnait beaucoup de valeur et de préciosité à l’eau, on l’économise du coup).
Ce coup-ci on a un bungalow familial, en plus de notre petit Oscaro squatteur de lit, nous avons des colocataires Matis et Nina qui se chamaillent pas mal dans le lit (pas facile de dormir à 2 dans un grand lit sans gigoter, se donner des coups sans le faire exprès). Ce qui est bien quand on dort tous ensemble c’est que le soir on a notre rituel de lecture de roman: en ce moment c’est l’excellent « Le royaume de Kensuké » qui parle d’un enfant qui était parti faire le tour du monde en bateau avec ses parents et qui, suite à une chute en mer, se retrouve sur une île déserte (assez dans le propos du coup).
Alors cette semaine sans réseau, nous avons pu savourer de merveilleux snorkellings (PMT pour les français) en famille, nous avons vu des poissons sublimes, des oursins incroyables, des couleurs incroyables, des coraux de toutes les couleurs (bleus, violets, jaunes, rouges, oranges). Expérience sensationnelle!
Ça y est en plus de ne plus savoir quel jour on est, on ne sait plus quelle heure il est! Je commence à comprendre les petits lous de l’école qui demande à tout bout de champ « c’est l’heure des mamans? c’est l’après midi? » ça doit ressemble à ça l’instant présent!
On s’est régalé dans cet écolodge, on a aimé la vue sublime, la mer translucide, les plongées, se balader dans un village de pêcheurs, échanger sur l’écologie et les actions à mener pour un futur cohérent, on a aimé le bungalow assez roots (tout ouvert tout le temps pour avoir un peu d’air ), dormir avec de gros geckos à pois rouges, voir de nombreux lézards, quelques toucans double bec.
Une anecdote rigolote: un matin Nina tout enthousiaste nous dit « Oh j’ai vu un âne, à non ça à l’air d’être un petit cheval, je vais voir!! » et elle revient affolée « Ahhhh! c’est un taureau!! » bon en fait c’était un buffle du village d’à côté mais je comprends que le choc a dû être important. 🙂
Le matin j’aimais bien me lever tôt, écrire dans mon beau carnet, puis on allait manger au restaurant en famille, on papotait avec des jeunes volontaires (de 18 à 30 ans, étudiant, masseur, médecin généraliste..) qui voyagent pendant 6 mois un an ou plus à la conquête de rencontres, d’autres façons de voir la vie, de nouvelles perspectives… puis plongée, baignade, repos, lecture, la vie sans attente, rien à faire, rien à vouloir, juste accepter ce qui est et remercier pour la beauté.
On s’est aussi fait un petit défi » un pas pour nettoyer la planète en famille »: ramasser les déchets que la mer évacue dans les rochers; championnat du monde de plastique, polystyrène, corde de pêcheur et plastiques cassants, verre, poches plastiques…. Plutôt que de se désoler, râler, blâmer, se sentir coupable, responsable, fautif..accepter que c’est là, prendre la responsabilité même infime de nettoyer une parcelle de terre. Au final 7 poches pleines de déchets ramenées à l’écolodge et en échange on a gagné un apéro pour le coup! sympa et inattendu!! Merci!
Nous avons discuté avec « Monsieur Huns » cuisinier cambodgien et propriétaire d’une guest house qui m’expliquait qu’il œuvrait pour aider son village à prendre soin de sa Nature: replanter des mangroves, collecter les déchets (qui flottent partout dans le village!), réutiliser les déchets pour leur donner une autre vie (flotteurs pour bateau), faire de la prévention auprès des enfants, soutenir des familles pour revenir à la production traditionnelle d’huile de coco… Une belle discussion qui une fois de plus me donne confiance dans la jeunesse, son énergie, ses idées, ses valeurs pour se relier à la Nature et changer notre rapport de consommation et de production de déchets. Nous sommes arrivés à la conclusion que dans un premier temps il allait falloir nettoyer, récolter les déchets (sur et sous terre, en mer, dans les rivières), ensuite il serait bien de transformer, réutiliser ces déchets (en faire des briques, des routes, les refondre pour faire un nouvel objet), il faudra inventer, utiliser de nouvelles matières biodégradables (maïs, algue, feuille, fibre végétale en gros comme la Nature si nous produisons des déchets il doivent pouvoir être absorbés par la Nature sans mal) , reprendre des habitudes de nos parents et grands-parents qui étaient « écologiques » (sacs réutilisables, cabas, papiers, cartons, feuilles de bananiers pour le Cambodge…) et associer cela aux nouvelles technologies (recherche de consommation locale, éthique, nouvelles matières) et bien sûr il faudra accepter de consommer moins (de protéines animales dans un premier temps) mais aussi moins de sacs, d’habits, de casquette pour plus échanger, réparer, retransformer, louer, troquer…
Matis a renoué avec sa passion de la pêche et avec Nina ils ont fabriqué un radeau (ou une ébauche de radeau).
Heureux d’avoir rencontré Jeff et Julia, amis d’Aliona et leurs belles valeurs écologiques.
Une deuxième journée de transfert qui a débuté à 6h du matin où nous avons quitté avec joie cet hôtel miteux.
Les aéroports sont tout un poème pour nous aussi, retrouver notre E-billet sur notre téléphone, chercher du WIFI, nous débarrasser de nos lourds bagages et passer les « 46 » contrôle de sacs, douanes.
Voilà une 2ème étape de notre voyage qui se clôture , fini la Thaïlande, déjà presque un mois, il est temps d’aller explorer d’autres horizons. Je trouve compliqué de quitter un endroit dans lequel on se sent bien pour aller vers l’inconnu. Quitter la douceur de la Thaïlande pour un ailleurs que je pressens chaud!!
Les impressions et gratitudes de chacun de nous pour ce merveilleux pays.
Au bord de la plage de Koh Phayam je savoure les dernières pages de « La Vallée des Rubis » de Joseph Kessel. Mieux vaut tard que jamais, je crois n’avoir rien lu de lui avant cette semaine, pas même le célèbre « Lion ».